Dé-charité

Lettre à l’attention du  commissaire de l’exposition “Holocauste of love”, qu’il a eu l’amitié d’afficher le soir du vernissage.

 

Bordeaux, le 29 février 2012.

Andréric,

on avait convenu ensemble que j’apporterai pour ton exposition des sculptures. Mais tu le sais, je ne les amènerai pas. À la place j’ai écrit ça.

J’ai essayé de t’expliquer pourquoi je ne veux plus mettre mes sculptures dans ton exposition, mais je crains que tu n’ais pas entendu. Alors pour que ce que je t’ai dit ne se perde ni ne se transforme, je te l’écris. J’espère ainsi éviter les quiproquos sans pour autant perdre les équivoques.

C’est toujours difficile les lettres de rupture, c’est souvent quand les mots-dits n’ont pas été entendus qu’il y a dans l’épistole comme un dernier recours. Il aurait été plus facile pour moi de te céder en te prêtant ce que tu m’as demandé, mais je me sentirais bien lâche et ça n’aurait été juste ni pour toi, ni pour moi.

Pour moi parce que ces pièces dans ton commissariat (Holocauste of Love) serviraient un propos qui ne me convient pas. Pour toi parce que j’ai le sentiment que ce serait t’aider à persister dans une répétition qui t’es nocive. Quand tu m’as dit: “C’est la dernière! après j’arrête!”, je les ai toutes revues défiler depuis la première. Je crois que c’est ça l’enfer, c’est cette dernière qui sans cesse recommence.

Je te l’ai déjà dit, le travail d’artiste que tu n’oses pas faire me plait plus que ton travail de galeriste, et j’espère qu’un jour tu oseras arrêter avant la dernière (galer(i)e), pour autre chose, pour faire, pour toi.

Pierre Grangé-Praderas